04/07/2016

Lecture de l'été : Le destin Funeste de Michael Rockefeller


Aujourd'hui pour changer on parle un peu lecture. Vous êtes pour la plupart en train de préparer vos valises pour les vacances et je me suis dit que parler un peu bouquins et vous partager mon dernier coup de cœur pourrait vous donner un petit coup de pouce. 

Depuis que j'ai terminé mes études littéraires, et donc cessé de me sentir obligée de lire tous les classiques, je me suis pris de passion pour les histoires vraies. Bien que souvent romancées ou arrangées, rien ne me passionne autant que de lire des destins de personnages célèbres ou non, de me plonger dans leurs vie, et de tenter ainsi d'en apprendre un peu plus sur les humains. 

Lors de mon voyage à New York, j'avais été particulièrement frappée par l'histoire de ces grandes familles américaines qui possédaient toute la ville, et en particulier celle des Rockefeller, à qui l'on doit notamment le célèbre Rockefeller Center. Aussi quand je suis tombée sur ce roman traduit de l'américain au mois de mai, j'ai de suite été intriguée. 

L'histoire :
En 1961, disparaît le jeune Michael Rockefeller, 23 ans, fils du richissime vice-président des Etats-Unis Nelson Rockefeller, parti en Nouvelle-Guinée collecter des armes du peuple asmat, dit primitif, pour le musée d'Art primitif de son père. En pleine expédition en catamaran, il se heurte a de difficiles conditions climatiques et le bateau se retourne. Il décide de rejoindre la côte à la nage. Il ne sera jamais retrouvé, malgré un dispositif de recherches gigantesque, à la hauteur de la renommée familiale. La version officielle qui sera donnée à la famille et au Monde entier dira que le jeune homme se serait noyé. Mais des rumeurs toujours ont persisté sur l'éventualité que Michael ait été dévoré par les habitants d'un villages asmat, dans la tradition de la chasse de tête, que l'on croyait révolue depuis l'arrivée des missionnaires et de l'homme blanc en terre asmat. 

L’enquête :
Carl Hoffman, journaliste au National Geographic et auteur américain fasciné par les cultures indigènes, s'est lancé à la poursuite de la vérité et s'est rendu sur place pour mener l’enquête au bout du monde. Il a mené une étude très approfondie sur le sujet, puisant ses sources dans les lettres officielles, les journaux de Michael, rencontrant les prêtres Kessel et Van Peij qui étaient sur place au moment des faits, interrogeant habilement la population et les témoins éventuels, et surtout en se rendant en immersion totale pendant un mois dans le village asmat reculé, apprenant l'indonésien et l'asmat pour tenter de découvrir la vérité, en s'approchant au plus près de la culture asmat. 

Ce que j'ai pensé du livre :

Ce livre est un véritable voyage : d'une part, c'est le voyage de Michael, jeune homme plein d'espoirs, ambitieux, voulant à tout prix prouver au monde et surtout à son père ce dont il était capable, en partant à l'autre bout du monde avec ses rêves, ses carnets, caméras et appareils photos dernier cris et son assurance un peu naïve d'enfant gâté, et d'autre part celui de Carl Hoffman, à la recherche de la vérité historique et culturelle du drame de sa disparition. Ils nous emmènent avec eux, et avec eux nous découvrons une autre culture, une culture qui n'a rien à voir avec la nôtre, pleines de croyances et d'esprits, une culture où même les pires tabous (on ne mange pas son semblable) sont renversés, un monde où un blanc est un blanc, quelque soit la richesse ou la renommée de sa famille, et où les morts de la tribu doivent être vengées.
Ce livre m'a énormément interrogée sur notre propre culture, et sa soit-disant supériorité, me rappelant mes vieux cours de khâgne sur l'anthropologie. Tous les modèles sont abattus, on rencontre un peuple qui n'a jamais vu le moindre blanc, et qui s'en porte très bien, sur une terre plutôt hostile, presque en dehors du temps, avec ses propres traditions, ses fêtes, ses modèles familiaux, politiques, religieux, ceux qu'elle avait avant que l'homme occidental colonialiste ne lui impose les siens. On a aussi longuement le temps de se prendre de passion pour cet art dit primitif, à la suite de Michael, et pour le goût du voyage en dehors des sentiers battus, en immersion. On les suit pas à pas, à marchander des informations, du transport, de l'art, des photos contre des couteaux, du tabac, ou du riz. On se heurte avec eux aux mensonges, aux silences : le peuple asmat et le plus particulièrement le village d'Ostjanep, garde précieusement ses mystères et ses secrets. J'ai adoré lire cette enquête très documentée par Carl Hoffman, que j'ai dévoré comme un thriller, et je le recommande vivement. Et maintenant, je brûle de retourner au MET à New York, pour y admirer les trouvailles de Michael, les mâts bisj et les pirogues asmat, et me plonger encore plus dans cette culture fascinante.

Titre aux US : Savage Harvest, a tale of cannibals, colonialism, and Michael Rockefeller's tragic questo for primitive art.

Et pour plus de conseils lecture, je vous conseille de suivre de très près le projet de box de livres O Librius lancé par ma blogo-copine Marion ! 




Carl Offman et des hommes asmat à Papua, lors de la célébration d'un nouveau jeu, nom donné à la maison des hommes

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